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Article de Cyrille GARNIER – Cabinet Simon Associés
Avocat Associé – Docteur en droit

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http://www.lettredesreseaux.com/P-841-485-A1-la-loi-du-31-juillet-2014-loi-ess-impose-un-droit-d-information-prealable-des-salaries-en-cas-de-cession-de-fonds-de-commerce-ou-de-droits-sociaux.html

La loi n°2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, dite loi ESS a été promulguée le 31 juillet 2014, puis publiée au Journal Officiel le 1er août.

Elle instaure un mécanisme totalement inédit qui va bien au-delà de l’économie sociale et solidaire puisqu’elle permet aux salariés des sociétés de moins 250 salariés, de présenter une offre à la fois en cas de cession de fonds de commerce, mais également en cas de cession des parts sociales (actions ou valeurs mobilières) donnant accès à la majorité du capital social de la société qui les emploie, pour faire face « au phénomène des entreprises saines qui, chaque année, disparaissent faute de repreneurs, détruisant ainsi des emplois », ainsi que le soulignent les travaux parlementaires.

Ce mécanisme inédit peut être présenté en 4 points essentiels, qui retiendront l’attention.

1. Champ d’application de la loi :

Le champ d’application de ce nouveau dispositif légal est large puisque, par principe, sont ainsi visées toutes les entreprises :

  • i) qui n’ont pas l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail ;
  • ii) qui soumises à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail et se trouvant, à la clôture du dernier exercice, dans la catégorie des PME au sens de l’article 51 de la loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie (la catégorie des petites et moyennes entreprises (PME) est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes, et qui ont un chiffre d’affaires annuel inférieur à 50 millions d’euros ou un total de bilan n’excédant pas 43 millions d’euros).

Au sein de ces entreprises, sont exclues du dispositif les cessions de fonds de commerce et/ou de droits sociaux devant survenir par suite d’une succession ou d’une liquidation du régime matrimonial, les cessions de fonds à un conjoint, à un ascendant ou à un descendant, les cessions de fonds appartenant à une entreprise faisant l’objet d’une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires.

2. Contenu du droit d’information préalable des salariés :

La loi innove par la mise en place d’un dispositif en deux volets bien distincts : le premier concerne la cession de fonds de commerce (Loi ESS, art. 19), le second concerne la cession de droits sociaux (Loi ESS, art. 20).

a)    L’article 19 de la loi ESS instaure un dispositif contraignant en cas de cessions de fonds de commerce afin de permettre à un ou plusieurs salariés de l’entreprise de présenter une offre pour l’acquisition du fonds (l’article 19 de la loi ESS ajoute des sections 3 et 4 au Chapitre Ier du Titre IV du Livre Ier du code de commerce). Pour toutes ces entreprises relevant du champ d’application de la loi (cf. notre point 1°), une information des salariés s’impose dès lors que le propriétaire du fonds envisage de le céder ; les salariés disposent alors d’un délai de deux mois pour répondre, étant précisé que :

  • lorsque le fonds est exploité par son propriétaire, celui-ci notifie sa volonté de céder directement aux salariés en les informant qu’ils peuvent lui présenter une offre de rachat, et le délai de deux mois court à compter de la date de cette notification ;
  • lorsque le propriétaire du fonds n’en est pas l’exploitant, cette information est notifiée à l’exploitant du fonds et le délai de deux mois court à compter de la date de cette notification.

L’information des salariés peut être effectuée par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par ces derniers. De leur côté, les salariés sont tenus à une obligation de discrétion, mais peuvent se faire assister de différentes personnes : ainsi, à leur demande, les salariés peuvent se faire assister par un représentant de la chambre de commerce et de l’industrie régionale, de la chambre régionale d’agriculture, de la chambre régionale de métiers et de l’artisanat territorialement compétentes en lien avec les chambres régionales de l’économie sociale et solidaire et par toute personne désignée par les salariés, dans des conditions définies par décret (ce décret d’application n’est pas encore paru).

La cession peut intervenir avant l’expiration du délai de deux mois dès lors que chaque salarié a fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d’offre.

b)   L’article 20 de la loi ESS instaure également un dispositif contraignant en cas de cessions de droits sociaux afin de permettre à un ou plusieurs salariés de l’entreprise de présenter une offre pour l’acquisition des droits sociaux (l’article 20 de la loi ESS ajoute un nouveau Chapitre X au Titre III du Livre II du code de commerce). Pour toutes ces entreprises relevant du champ d’application de la loi (cf. notre point 1°), lorsque le propriétaire d’une participation représentant plus de 50 % des parts sociales d’une société à responsabilité limitée ou d’actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital d’une société par actions veut les céder, il doit mettre les salariés en mesure de formuler une offre de rachat. Ainsi, dans les sociétés qui n’ont pas l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail, les salariés sont informés de la cession à intervenir, au plus tard deux mois avant ladite cession, afin de permettre à un ou plusieurs salariés de présenter une offre d’achat de cette participation. Dans les sociétés soumises à l’obligation de mettre en place un comité d’entreprise en application de l’article L. 2322-1 du code du travail et se trouvant, à la clôture du dernier exercice, dans la catégorie des PME au sens de l’article 51 de loi n°2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, la société, le comité d’entreprise et les salariés sont informés de la cession à intervenir ; le chef d’entreprise indique aux salariés qu’ils peuvent présenter au cédant une offre de rachat.

A l’instar du dispositif prévu en cas de cession de fonds de commerce, l’information des salariés peut être effectuée par tout moyen, précisé par voie réglementaire, de nature à rendre certaine la date de sa réception par ces derniers. De leur côté, les salariés sont tenus à une obligation de discrétion, mais peuvent se faire assister de différentes personnes.

De même, la cession de droits sociaux peut intervenir avant l’expiration du délai de deux mois dès lors que chaque salarié a fait connaître au cédant sa décision de ne pas présenter d’offre.

3. Sanction :

Si la cession se réalise alors que l’information n’est pas faite dans les conditions requises par la loi, une action en annulation est ouverte à « tout salarié » ; l’action en nullité se prescrit par deux mois à compter de :

  • la date de publication de l’avis de cession du fonds (pour ce qui concerne les cessions de fonds de commerce) ;
  • la date de publication de la cession de la participation ou de la date à laquelle tous les salariés en ont été informés (pour ce qui concerne les cessions de droits sociaux).

4. Entrée en vigueur :

Si la loi ESS entre en vigueur le 2 août, au lendemain de sa publication au JO, il en va différemment du droit d’information des salariés. Pour ce qui concerne en effet les articles 19 et 20 de la loi, les dispositions s’appliquent aux cessions conclues (de fonds de commerce ou de droits sociaux) trois mois au moins après la date de publication de la loi (Loi ESS, art. 98), c’est-à-dire aux cessions (de fonds de commerce ou de droits sociaux) conclues à compter du 1er novembre 2014.

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