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Article de Vincent Lepercq, paru dans les echos.fr le 16/04/2014

Les foncières dans le collimateur de la loi Pinel

Le projet de loi porté par Sylvia Pinel pourrait redonner une marge de manoeuvre aux enseignes. Mais les négociations entre propriétaires et locataires sur une nouvelle répartition des charges et impôts sont au point mort.

Le volet commercial de la loi Pinel, votée à l’Assemblée nationale le mois dernier et en discussion au Sénat cette semaine, vise d’abord les petites enseignes de centre-ville. Leur loyer a augmenté de 3 % en un an et de 8 % lors des quatre exercices précédents. Pour certains, cette dépense dépasserait les charges de personnel. Le texte propose, pour alléger cette charge et rendre son évolution plus prévisible, d’étendre au centre-ville l’ILC (indice des loyers commerciaux) utilisé dans les centres commerciaux et moins volatil que l’ICC (indice des coûts de construction). Il prévoit aussi de faire passer de deux à trois ans les baux dérogatoires, qui peuvent permettre à de jeunes marques de tester des boutiques.

La loi envisage de limiter à 10 % la hausse annuelle des loyers pour les baux classiques 3-6-9 et de lisser les hausses supérieures, liées par exemple à des travaux, sur plusieurs années. Elle pourrait aussi donner aux enseignes la possibilité de résilier leur bail au bout de trois ans. Le texte devrait enfin renvoyer à un décret la liste précise des charges transférables par le propriétaire aux locataires. Pour les enseignes implantées dans les centres commerciaux, le sujet est sensible : Jusqu’à présent, les charges que les foncières font payer à leurs locataires ne sont que rarement justifiées, affirment ces derniers. Voilà donc peut-être bientôt inscrites dans le marbre plusieurs vieilles revendications brandies par les défenseurs des enseignes. Mais leurs porte-parole (Procos, Ucv, CGPME) ne crieront victoire que s’ils concluent par un accord clair le cycle de réunions entamé avec les représentants des bailleurs, pour fixer une nouvelle répartition des charges et impôts. Le sujet est sensible : jusqu’à présent, les dépenses que les foncières font payer à leurs locataires ne sont que rarement justifiées, affirment ces derniers. « C’est mal parti », juge un participant à ces négociations, destinées à la rédaction d’un décret d’application. « Les foncières parient sur des cafouillages liés au changement de ministre. » Sylvia Pinel, ex-ministre du Commerce, a changé son portefeuille pour le logement au cours du remaniement ministériel du 2 avril.

Les commerçants souhaiteraient ne plus avoir à payer ni les gros travaux de rénovation des immeubles, dans les centres commerciaux où leurs magasins sont implantés, ni les impôts qui leur sont répercutés par des bailleurs. Ces quelques points de marge peuvent représenter plusieurs millions d’euros pour les grandes foncières d’immobilier de commerce.

Les associations de commerçants s’accrochent d’autant plus à cette position qu’elles n’ont pas pu aller aussi loin qu’elles le voulaient sur certains points du projet de loi. Le texte exclut pour l’instant de la nouvelle faculté de résiliation triennale du bail les contrats de plus de neuf ans, qui sont la règle dans beaucoup de centres. Ces baux ne sont pas non plus concernés par la limitation, des hausses de loyer à 10 % par an. Enfin les futures dispositions relatives à la répartition des charges entre locataires et propriétaires ne s’appliqueront qu’à compter du 1er janvier 2016. Conclusion de la Fédération du commerce associé (Fca) : « Les locataires des centres-villes et les locataires des grands centres commerciaux ne bénéficieront pas de la même protection.»

Les bailleurs jouent clairement la division chez les commerçants, en faisant remarquer que cette nouvelle réglementation va surtout profiter aux grandes enseignes comme Zara et H&M. Alors que dans l’exposé des motifs de la loi figurent « la dynamisation du commerce de proximité, en rénovant le régime des baux commerciaux, et la diversité des commerces, en modernisant l’urbanisme commercial ». Certains bailleurs prévoient déjà de nouvelles parades, comme des augmentations de loyer. D’autres soulignent « le risque de couper le robinet des financements pour le cœur de villes moyennes et petites, en décourageant des investisseurs faute de rentabilité et de revalorisation ».

Vincent LEPERCQ, Les Echos, le 16/04/2014.

D’autres changements en perspective :

Fusion des demandes de permis de construire et d’autorisations de surfaces commerciales auprès de la Commission d’aménagement commercial. Les promoteurs jugent que cette mesure va alourdir le coût d’élaboration des projets commerciaux, sans assurance de réalisation.
Fin de l’obligation de déposer une nouvelle demande en Cdac en cas de changement d’enseigne.
La Cnac peut s’autosaisir des projets commerciaux de plus de 20.000 m2.
Le droit de préemption des communes peut être délégué à un établissement public.
Comme dans le logement, le locataire bénéficiera d’un droit de préférence en cas de vente du local.
La loi Alur contraint les magasins « drive » à passer en Cdac-Cnac et encadre la taille des parkings de commerce.

 

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